Partenariat entre la halte-garderie et les établissements de soin des enfants accueillis

La halte-garderie bénéficie d’un agrément pour l’accueil de 25 enfants / heure.  L’accueil de l’enfant porteur de handicap moteur est inscrit dans son projet pédagogique. 

Pour l’année 2016 / 2017,  2 enfants orientés par les établissements de soins (le centre Paul Dottin et le Centre d’Action Médico-Sociale Précoce) fréquentent la structure.
Pour chacun d’eux, nous avons défini les temps d’accueil hebdomadaires selon les besoins des parents et en concertation avec les équipes spécialisées et le Médecin référent Petite Enfance de la ville de Toulouse. Ces temps d’accueil sont revus en fonction du  contexte social ou médical de l’enfant et de sa famille, par exemple pour être adaptés à l’inscription d’un parent dans un parcours d’insertion professionnelle.

Un suivi médical de ces enfants  est coordonné par le Médecin Petite Enfance. Des échanges réguliers entre les différentes structures d’accueil et de soin permettent de suivre l’évolution de l’enfant et réajuster sa prise en charge. Des professionnels spécialisés peuvent venir à la halte-garderie (kinésithérapeute, éducateur spécialisé…) pour observer le comportement de l’enfant, accompagner l’équipe pour adapter l’accueil au plus près des capacités motrices, apporter du mobilier adapté  (chaise spécifique pour le maintien du dos par exemple).
La halte-garderie reste un lieu de vie et d’accueil collectif. Le service qu’elle offre aux familles est d’ apporter en complément des services de soins un accueil individualisé soutenant.

Au contact du groupe, l’enfant apprend à trouver sa place, se socialise progressivement et démultiplie ses facultés d’éveil et d’épanouissement.
L’équipe le laisse libre d’y vivre sa vie d’enfant, sans banaliser ses difficultés et sans pour autant le réduire à son handicap.

La participation active de l’ensemble de l’équipe est essentielle pour assurer une cohésion d’accueil.
Pour les parents, confier leur enfant à la halte-garderie c’est fréquenter souvent pour la première fois un milieu ordinaire, c’est  la possibilité de s’accorder du temps pour soi dans un contexte difficile, c’est aussi s’occuper de la fratrie ou tirer bénéfice des échanges avec des professionnels de la petite enfance en dehors du personnel soignant.

 

Témoignage de professionnel Halte-Garderie

Projet de soin, projet de vie

Un partenariat hôpital de jour-crèche autour de jeunes enfants présentant des troubles du spectre autistique

Par le Docteur Laurence Carpentier

A lire également la Fiche Pratique « Aménagement pour l’accueil d’enfants présentant des troubles du spectre autistique »

Notre équipe est celle d’un hôpital de jour pour des petits (hôpital de jour des Bourdettes, pôle Guidance infantile, secteur III de psychiatrie infanto-juvénile de haute-Garonne).  Y est adossée une Unité de soins précoces pour les enfants d’âge préscolaire présentant des retraits relationnels annonciateurs ou non d’autisme. L’accueil de ces bébés nous a conduits à un partenariat privilégié avec les lieux d’accueil petite enfance de notre secteur, sous diverses modalités :
– information sur les signes d’alerte évoquant un retrait relationnel ;
– observation sur site des enfants, avec accord de leurs parents, pour faciliter le passage vers nos structures quand les familles sont réticentes à consulter ;
– accompagnement de l’intégration en crèche initiée par notre service ou pour des enfants dont le repérage des difficultés et la mise en place du soin sont secondaires à l’admission dans la structure petite enfance.
Nous proposons ici de réfléchir autour de cet accompagnement, de ses modalités, de ses attendus pour des jeunes enfants porteurs de Troubles du spectre autistique (Tsa).

 

PROJET DE SOIN

À l’hôpital de jour, lors de l’accueil de ces enfants, nous éprouvons indéfiniment l’impact tragique de leurs troubles sur leur famille. Autour de ce drame, la vie a volé en éclats. Le projet de vie de la famille est en suspens, celui de l’enfant n’est plus pensable. Une attention particulière est portée à cet aspect traumatique. Il est pris en compte dans notre projet de soin qui repose sur un trépied : le soin au niveau de l’enfant, l’accompagnement des parents, l’accès à une socialisation, au mieux en crèche ou en halte-garderie.
L’articulation de ces trois espaces est essentielle, en respectant les niveaux de préoccupation et de discours bien distincts les uns des autres :
– projet thérapeutique de l’équipe soignante ;
– projet éducatif et de vie des familles ;
– projet éducatif et pédagogique de la crèche.
Le travail avec les crèches qui accueillent les enfants suivis par notre équipe fait partie intégrante du travail soignant. Parents, équipe de soin, équipe de crèche sont partenaires dans l’aide apportée à l’enfant. La rencontre de ces trois groupes sociaux, qui ont chacun leur logique, leurs présupposés, leurs croyances, est délicate. Le cadre proposé favorise le repérage des places et soutient les échanges entre les parents, les professionnels du soin et ceux de la crèche.

PROJET DE VIE

La socialisation des enfants, le recours à des modes de garde extrafamiliaux, principal axe de leur projet de vie, nous semblent essentiels dans leur accompagnement.
Quand l’enfant est en capacité de supporter le fait d’être en groupe et ne nécessite pas la mobilisation permanente d’un adulte, le recours aux modes d’accueil collectifs est préférable. La relation duelle avec un enfant porteur de ce type de difficulté peut être très compliquée sans tiers ni instance de partage et de réflexion. Les difficultés ressenties dans la rencontre avec ces enfants peuvent susciter rejet, projections sur les parents, sources de confrontation directe, ou, à l’inverse, participation avec la famille à une communauté de déni. Nous constatons en effet que pour la plupart des enfants porteurs de Tsa confiés à une assistante maternelle lors de leur entrée dans l’institution, soit les troubles ne sont pas repérés par l’assistante maternelle, même lorsqu’ils sont patents, soit le lien avec les parents est tendu, aboutissant souvent à une rupture de ce mode de garde.

Lorsque l’enfant se rend plusieurs fois par semaine sur un lieu d’accueil, la crèche est préférée à une halte-garderie, la constitution d’un groupe fixe d’enfants étant davantage repérante qu’une halte-garderie.

L’intégration sur les lieux d’accueil petite enfance étaye le processus de séparation-individuation, tant du côté de l’enfant, en lui offrant d’autres regards attentifs et bienveillants que ceux de ses parents, que du côté des parents. Nombre d’entre eux ont en effet du mal à confier leur enfant, persuadés qu’eux seuls peuvent le comprendre, s’ajuster à ses attitudes énigmatiques, à ses troubles du comportement, ou au moins les supporter.

Pour l’enfant, être parmi d’autres enfants qui vont bien lui permet également de vivre d’autres expériences relationnelles que celles proposées à l’hôpital de jour avec des enfants présentant de graves troubles de la personnalité, de faire d’autres types de découvertes, d’expériences. Pour les parents, cela permet de retrouver une disponibilité pour eux-mêmes, pour reprendre une activité professionnelle ou pour le reste de la fratrie ; de rompre l’isolement, fréquent avec des enfants en si grande difficulté ; d’appartenir à une communauté ordinaire. Par ailleurs, l’intérêt, l’investissement des professionnels pour l’enfant, la reconnaissance de ses compétences soutiennent l’investissement de l’enfant et redonnent confiance aux parents dans leurs compétences parentales.

Néanmoins, pour certains parents, la rencontre quotidienne avec des enfants qui n’ont pas de difficulté de développement peut être douloureuse, réactivant le traumatisme d’avoir un enfant différent. Cela doit être repéré pour différer le projet ou organiser autrement les accompagnements.

LE SOUTIEN À L’INTÉGRATION, CONDITION NÉCESSAIRE À SA RÉALISATION

La confrontation avec un enfant porteur de troubles du spectre autistique, sa difficile rencontre, l’importance de ses troubles du comportement peuvent mettre à mal les équipes de crèche, susciter des éprouvés contrastés, des mouvements affectifs forts (de l’enthousiasme corrélé à du déni au rejet), des sentiments d’impuissance, d’incompétence. Les troubles de l’enfant peuvent générer alors des réactions déstructurantes, des spirales interactives, peu favorables à son évolution et même, simplement, à son bien-être.

Aussi, l’accueil d’un enfant suivi à l’hôpital de jour dans une structure petite enfance ne peut se concevoir que dans un travail où l’équipe de soin s’engage aux côtés de la crèche. Nos modalités d’intervention sont diverses, adaptées aux difficultés de l’enfant, aux demandes de la structure d’accueil et des parents, au contexte (accueil à la demande de l’hôpital de jour ou soutien d’un accueil préalable à l’institution de soin).

Des temps de rencontre entre les professionnels de la crèche, ceux du soin et les parents jalonnent le parcours de l’enfant, de la préparation de son intégration jusqu’au relais par une autre structure. La socialisation est le plus souvent poursuivie en école maternelle après une année de maintien supplémentaire, l’enfant étant rarement prêt à aborder le grand groupe classe et ses exigences, même accompagné d’une auxiliaire de vie scolaire, à 3 ans. Ces rencontres permettent de consolider les liens entre les divers interlocuteurs, d’établir des rapports de confiance réciproque. Elles précisent et articulent les réponses sur les différents plans thérapeutiques et éducatifs, prévenant les confusions et les rivalités. Elles aident les professionnels de la crèche à approfondir leurs interrogations et à mieux comprendre cet enfant si différent, à repérer ses spécificités liées à l’autisme ou non, ses difficultés, ses potentialités. En soulignant les petits riens, les petites avancées ou parfois les plus grandes, elles soutiennent les équipes, préviennent le découragement, le désengagement. Elles valorisent leurs perceptions, leurs adaptations.

Ces temps permettent également l’accueil des difficultés de l’équipe, parfois de ses impossibles qui nous conduisent à moduler le projet d’intégration.

Des observations ponctuelles de l’enfant sur le lieu crèche appuient l’observation de l’équipe – à la manière de l’observation du nourrisson selon la méthode d’Esther Bick, qui soutient le regard et l’investissement maternels. Sensibilisée à la psychopathologie, l’équipe de soin apporte sa connaissance, en particulier des stratégies défensives déployées par l’enfant en souffrance. Elle interroge quelquefois des conduites qui peuvent passer inaperçues aux yeux de l’équipe, facilitant ainsi le repérage des difficultés de l’enfant.

Des accompagnements réguliers par l’éducateur référent peuvent être mis en place. Il s’agit parfois d’accompagner l’enfant, à jour fixe, de l’hôpital de jour à la crèche, pour échanger régulièrement autour de lui et devant lui, rendre vivants les liens, l’aider à construire une continuité dans son vécu. D’autres fois, des temps de travail réguliers autour de l’enfant avec son éducateur référent sont mis en place à la crèche, avec le personnel de l’accueil et dans les activités proposées par ce lieu. L’éducateur soutient l’enfant dans ces nouvelles expériences, étaye le regard du personnel de la crèche, les rassure sur les possibles de cet enfant, leur témoigne d’une manière d’être et d’entrer en relation avec lui. Ces temps permettent aussi de soulager la crèche, de repérer les limites de l’intégration.

PROJET D’ACCUEIL INDIVIDUALISÉ

L’ensemble de notre soutien, de notre écoute, reste centré sur l’enfant, son comportement au quotidien à la crèche, la compréhension de ses besoins. Il vise à faciliter l’ajustement et l’individualisation du projet éducatif de la crèche à cet enfant singulier. La question des parents n’est pas abordée avec le lieu d’accueil, leur accompagnement renvoie chaque équipe à son projet, à ses spécificités et manières de faire avec les parents.

Les enfants accueillis en crèche sont dans une période sensible et vulnérable de leur développement, l’enjeu des crèches est de leur offrir un environnement suffisamment sécure pour se construire psychiquement. L’organisation temporelle permet à l’enfant la mise en place d’un monde sûr et prévisible (rituels, tours de rôle, sens des séquences dans les activités du quotidien…). La reconnaissance de sa place et de son unicité est favorisée par l’identification d’espaces personnalisés : son casier, sa place à table, au mieux, son lit.

Surtout, pour faire d’un lieu d’accueil un lieu de construction, l’enfant doit pouvoir construire des relations d’objets stables et fiables. L’organisation du travail de la crèche permet de telles relations, relations bienveillantes faites d’attention individualisée avec des adultes disponibles, et plus particulièrement avec un adulte référent, à travers des rencontres régulières et de ce fait anticipables par l’enfant, souvent autour des propositions liées aux repas, à la toilette, au sommeil. Durant les activités, l’ajustement aux réactions et aux mouvements spontanés de l’enfant contribue à lui donner confiance en sa valeur, à étayer la construction de son narcissisme. L’enfant se sent soutenu, il accède au processus de séparation-individuation, se socialise tant dans la rencontre avec l’autre que dans l’appréhension des règles sociales, acquiert des capacités de contrôle émotionnel, renforce son plaisir de découverte et d’exploration du monde qui l’entoure.

Une attitude observante et continue des modes d’expression de chaque enfant (comportement, signaux de bien-être et de malaise, manifestations des attentes et des émotions) permet d’ajuster au mieux le projet aux besoins de l’enfant et à ses éventuelles entraves. Les réunions d’équipe de crèche facilitent l’échange des observations, l’élaboration du projet, parfois avec l’aide de tiers extérieurs.

C’est sur ces compétences, ces savoir-faire, ces savoir-être, que nous nous appuyons pour accompagner les crèches. Nous ne travaillons pas sur les équipes mais avec les équipes. L’idée n’est pas de leur dicter la marche à suivre, mais de les soutenir dans leurs questionnements. Prendre soin de l’institution est une manière indirecte de prendre soin de l’enfant qui y est accueilli.

L’équipe de soin soutient l’individualisation du projet, le repérage des besoins spécifiques de l’enfant. Une fiche « aménagements pour l’accueil d’enfant présentant des troubles du spectre autistique » (voir ci-dessous) a été élaborée par notre structure à partir des connaissances actuelles sur le fonctionnement de ces enfants. Travaillée en amont avec les parents, puis avec le personnel de la crèche, elle permet de repérer les items valides pour cet enfant, en termes de communication, de soutien à la relation, d’aide à l’anticipation, de repérage des particularités sensorielles ou encore du sens des manifestations comportementales.

Un décalage trop important entre le projet de la crèche et ce qui peut être proposé à l’enfant entrave parfois cet ajustement nécessaire. Le regard de l’équipe de soin permet alors que cette adaptation ne soit pas vécue comme une renonciation, un laisser-faire, mais comme une adaptation au rythme de développement propre de l’enfant, en évitant les deux écueils d’une exigence prématurée ou d’une absence d’exigence.

LES PARENTS

Les parents, nous l’avons déjà souligné, sont bien souvent dans un grand désarroi qui se manifeste par du silence, de l’agressivité, une impossible acceptation du handicap qui fait penser à du déni, un manque de confiance en eux-mêmes et projeté sur les professionnels. Leurs liens avec la crèche sont quelquefois difficiles. Même si nous ne travaillons jamais avec les crèches autour des parents, nous espérons que l’empathie que nous ressentons pour eux, l’attention qui leur est portée afin qu’ils acquièrent progressivement un sentiment de confiance en eux-mêmes et en leur enfant permettent de décaler le ressenti parfois négatif des personnels de crèche.

L’aide aux parents dans ce contexte, c’est de les positionner comme partenaires des équipes de soin et d’accueil, acteurs des soins et du projet de vie de leur enfant. Notre dispositif de rencontre en présence des parents leur reconnaît cette place. Un lien peut s’établir, lien de confiance dans l’effort partagé, qui soutient le passage de la culpabilité, de la sidération, vers la responsabilisation.

La capacité des équipes de soin et de crèche, voire aussi des autres parents, en particulier ceux de l’hôpital de jour, à souligner voire à s’émerveiller des progrès des enfants qui leur sont confiés permet parfois l’émergence ou la renaissance de cette capacité d’émerveillement devant les avancées de l’enfant, avancées par rapport à ce qu’il est et non à ce qu’il aurait dû être. La restauration de cette capacité marque la sortie du traumatisme… Elle n’est pas continue et il faudra encore, pour nombre des parents, de nombreux mois ou années pour vivre avec et réinvestir leur projet de vie.

DIFFICULTÉS ET LIMITES

L’accueil sur les lieux d’accueil petite enfance des enfants en grave difficulté est dorénavant une obligation, c’est aussi une difficulté. Il y a des situations difficiles, parfois des situations limites, quelquefois des impossibilités. Les facultés d’adaptation du personnel de la crèche sont largement sollicitées.

Souffrant de conditions de travail souvent difficiles, avec un nombre d’enfants accueillis dans chaque structure surbooké afin de pallier les éventuelles absences, tandis que le ratio de personnel encadrant a légalement diminué ces dernières années, les équipes peuvent être dans un rejet ou du moins une non-adhésion au projet d’accueil de ces enfants.

Les souffrances des enfants, de leurs parents, peuvent se diffuser, se transmettre. Des résistances apparaissent alors, qu’il faut pouvoir repenser dans le fonctionnement de l’équipe. L’aide d’un tiers extérieur, qui n’est pas un membre de notre équipe, sur les temps de rencontre propres à l’équipe crèche, est en ce cas précieuse.

En ce qui concerne l’équipe de soin, nous devons être vigilants à ne pas être perçus, d’une part, comme d’éventuels juges censeurs, d’autre part, comme une équipe dans l’impossibilité d’accueillir les souffrances et difficultés de l’équipe crèche, de pouvoir reconnaitre les limites de l’intégration. Penser tous ensemble, dans une dynamique d’humilité et de partage, permet d’éviter ces dérives et de construire une collaboration au long cours avec certaines entités.

CONCLUSION

Après plusieurs années d’un tel partenariat, nous pouvons témoigner combien articuler projet de soin, projet de vie est porteur pour les enfants et leurs familles.

Sur le lieu crèche, notre intervention, qui permet de décentrer du manque, des déficits, tout en les reconnaissant bien sûr, de regarder l’enfant tel qu’il est et non tel qu’il devrait être, ouvre des perspectives fructueuses…

Des moyens spécifiques sont à mettre en place pour permettre la disponibilité nécessaire à l’accueil des enfants présentant de si graves difficultés. Notre devoir est d’en témoigner pour soutenir ces demandes.

Certains enfants, alimentés très tôt et longtemps par sonde naso-gastrique ou gastrostomie, n’arrivent plus à s’en passer et à manger par la bouche. Revue des solutions pour passer le cap.

Quand parle-t-on de dépendance ?
Lorsqu’un enfant refuse systématiquement tout aliment, ne veut rien mettre en bouche ou recrache tout ce qu’il avale par peur de déglutir. Ou lorsqu’il ne mange pas en quantité suffisante pour couvrir ses besoins énergétiques, grandir et grossir. Ces difficultés desevrage de la nutrition entérale (alimentation directe dans le tube digestif, sans passer par la bouche), tant sur le plan physiologique que psychologique, peuvent être le résultat de longues années d’alimentation artificielle.
À quel moment envisager le sevrage ?
Lorsque les troubles à l’origine de la mise en place de la sonde ou de la gastrostomie
(fausses routes à répétition, troubles importants de la déglutition et de l’oralité, etc.) ont été résolus ou se sont suffisamment améliorés. Le feu vert des médecins est toujours nécessaire. Chez certains enfants, ce sevrage prendra quelques semaines. Pour d’autres, il faudra des mois, voire des années pour (ré)apprendre à s’alimenter.
Pourquoi c’est parfois compliqué ?
Certains enfants n’ont pratiquement jamais mangé d’aliments solides. Ils peuvent conserver un souvenir de fausses routes douloureuses, ressentir le stress de leurs parents… Ceux qui n’ont connu que l’alimentation artificielle peuvent avoir développé une hypersensibilité au chaud, au froid, à une texture d’aliment à laquelle ils ne sont pas habitués et qui peut leur être désagréable (collant, gluant, etc.). La nutrition entérale prolongée réduit la sensation de faim, ou cette dernière est mal interprétée par l’enfant. L’enfant ne comprend pas que c’est en mangeant que cette désagréable sensation dans son ventre disparaîtra.
Peut-on prévenir cette dépendance ?
Pour éviter le risque de dépendance, la prévention reste la meilleure arme. Il faut installer l’enfant sondé à table lors des repas en famille, lui permettre de toucher la nourriture, même s’il ne la met pas en bouche. Des ateliers de « patouille alimentaire », ainsi que des massages de la bouche pour réduire l’hypersensibilisation de cette zone, peuvent être proposés par un orthophoniste ou un psychomotricien.
Vers quels professionnels se tourner ?
Quelques rares services hospitaliers ont l’habitude du sevrage de l’alimentation artificielle. De plus en plus de médecins, d’orthophonistes et de psychomotriciens s’intéressent aussi à ces troubles et peuvent proposer un bilan des troubles de l’oralité. Pourtant, une fois la sonde posée et le problème médical résolu, de nombreux parents se plaignent d’un manque d’anticipation et d’organisation du sevrage. « Nous ne manquons pas de connaissances sur le sujet, mais de moyens humains, logistiques et financiers pour accompagner les familles dans la durée, reconnaît le professeur Véronique Abadie, chef du service de pédiatrie générale de l’hôpital Necker à Paris. Et comme le nombre de professionnels formés reste encore insuffisant, les parents ne doivent pas hésiter à demander leurs coordonnées dans les services hospitaliers ou dans les CAMSP. »
Y a-t-il des alternatives ?
Lorsque les parents ne trouvent pas de solutions en France, certains, comme Alexandra Germain, de l’association Bébé sans fil, regardent vers l’Autriche. « Notre fille Loya a eu une sonde “provisoire” quelques jours après sa naissance. Mais à l’âge de 8 mois, elle ne mangeait toujours pas. Les listes d’attente en CAMSP étaient longues et nous ne trouvions pas de pro en libéral prêt à nous aider. Nous avons donc créé une association pour financer un stage de sevrage proposé par une équipe de professionnels autrichiens à l’hôpital de Gratz. Pour nous, 3 000 € pour trois à quatre semaines de prise en charge (jusqu’à 8 500 € pour certaines familles). Ce stage est parfois financé par la Sécurité sociale ou la MDPH, mais pas le voyage, ni les frais sur place. Kinés, psychologues,pédiatres, etc., sont réunis sur un même lieu et proposent des ateliers individuels et collectifs chaque jour. Les enfants apprennent à jouer avec les aliments, à les manipuler, avec en parallèle, une diminution progressive des apports par sonde. Pour nous, ça a marché et notre fille prend aujourd’hui plaisir à manger. Après des mois d’angoisse de voir notre enfant vomir tout ce qu’elle avalait, nous sommes vraiment soulagés. »
http://www.magazine-declic.com/dependance-a-lalimentation-artificielle-6-questions/

Laisser son enfant malade ou handicapé à un proche pour le week-end, ou pour quelques heures dans une halte-garderie : c’est possible !

« Dès que nous avons pris la mesure du handicap de Claire, la question s’est posée : à qui pourra-t-on la confier, qui aura les mêmes gestes que nous, au bon moment ? Qui d’autre saura la soulager ? Et elle, acceptera-t-elle le contact avec une nouvelle personne ? » Ces interrogations, Karen, la maman de Claire, 5 ans et demi, atteinte du syndrome de Rett, commence à peine à y répondre.
Le confier, mais à qui ?
L’angoisse au moment de passer le relais, les questions sur la légitimité du tiers qui va s’occuper du tout-petit en situation de handicap : rien que de très naturel chez tous les parents, surtout lors des premières séparations. Cependant, cette étape peut être plus difficile à franchir en raison du handicap : « On voudrait se détacher de cet enfant comme d’un autre, mais tout est plus compliqué, d’un point de vue affectif et pratique », résume Karen. Au point que confier son enfant apparaît davantage comme une source d’angoisses que comme une possibilité de souffler. Commence alors un véritable parcours psychologique, au cours duquel chacun doit apprendre à “se détacher”, tant bien que mal.
Le membre de la famille, bonne ou mauvaise solution ?
Ce pas serait-il plus facile à franchir avec un membre de la famille ? Pas forcément, témoignent les parents, qui se heurtent à leurs propres peurs, en plus de celles d’une grand-mère, d’un oncle… « Entre ceux qui ne se sentent pas capables de garder ma fille ou qui n’y pensent pas et ceux que je ne juge pas aptes, il ne reste plus grand monde », reconnaît Karen. Négociations pour une garde à domicile, angoisses liées aux gestes à effectuer en cas de problèmes graves comme une fausse route ou une crise d’épilepsie : il y a toujours de bonnes raisons d’hésiter.
Accepter ses blocages
Les motifs de ce blocage sont divers. Ils s’alimentent souvent de peurs concrètes, notamment lorsque l’enfant en situation de handicap a besoin de soins spécifiques ou qu’un risque vital est en jeu. « J’ai peur qu’en cas de crise d’épilepsie sévère, par exemple, personne ne sache faire le bon geste avec ma fille. Nous, parents, sommes rodés. J’identifie le moindre signe de mal-être, alors qu’une autre personne ne le comprendrait pas systématiquement », explique Christine. Sa fille, Aurore, atteinte de la monosomie, a aujourd’hui 15 ans. Au fil des années, mère et fille ont instauré des codes, un langage spécifique. Pour Christine, difficile de trouver quelqu’un qui “mérite” de garder sa fille, qui puisse, simplement, appréhender aussi bien ses besoins. Les freins s’expriment également sur un autre terrain. « J’ai surtout peur qu’on fasse du mal à Aurore, qu’on profite de sa vulnérabilité. Il me faudrait sans doute des mois pour le découvrir ou en être informée. »
Derrière la difficulté à confier son enfant transparaît la culpabilité de la mère ou du père. L’idée que, s’il est laissé entre d’autres mains, “abandonné” aux soins d’autres personnes, son bien-être est compromis. « Je n’ai pas trop de mal à confier Vincent, mais il est certain que le blocage vient de cette culpabilité. Il faut arriver à admettre que notre fils vit bien sans nous aussi, qu’il n’est pas malheureux avec d’autres personnes, qu’il est même ravi ! », raconte Chantal, dont le fils, Vincent, âgé de 9 ans, est atteint d’une leucodystrophie.
Arrivera le moment de l’ennui avec vous
Du blocage à l’action, le pas est généralement long à franchir. La véritable remise en question passe souvent par le comportement de l’enfant. Un jour, il manifeste sa lassitude, son envie de voir de nouvelles têtes. « Pendant six ans, Aurore a eu une nounou en qui j’avais toute confiance. Lorsque celle-ci est tombée malade, ma fille et moi avons repris notre petite vie à deux, heureuses. Jusqu’au jour où je me suis aperçue qu’elle s’ennuyait, avec moi. J’ai culpabilisé et décidé d’agir, pour son bien-être », explique Christine. Dans la foulée de cette prise de conscience, elle a inscrit sa fille dans un centre spécialisé, deux jours par semaine. « Aurore s’est intégrée tout de suite ! Pour le moment, je ne peux pas envisager plus, mais j’ai demandé un rendez-vous avec l’assistante sociale et la psychologue du centre. Je veux sortir de cette phobie, de l’emprise que j’ai sur ma fille, car elle est pesante, aussi bien pour elle que pour moi. »
Échanger avec les pros et leur faire confiance
Que ce soit par l’intermédiaire d’un institut médico-éducatif ou d’un Camsp, un échange avec une psychologue permet d’aborder ce sujet, parfois tabou, et de faire un premier grand pas vers une évolution en profondeur. « L’accueil en crèche, celui du Camsp et le contact avec les professionnels de l’institut où Vincent est actuellement ont joué un rôle déterminant. Le fait qu’une structure soit très à l’écoute des parents facilite vraiment la garde », confirme Chantal, qui a confié son fils depuis son plus jeune âge pour travailler. Depuis la mini crèche, cette maman a fait du chemin. « L’institut de Vincent propose la formule de l’internat à la demande, c’est idéal. Il ouvre un week-end sur deux, ce qui nous permet de l’y laisser de temps en temps. J’ai commencé par une nuit, puis un jour et une nuit, jusqu’à réussir à partir une semaine aux sports d’hiver. De toute façon, priver Vincent de cette socialisation aurait été impensable. »
Parvenir à prendre de la distance
La maman de Claire avance elle aussi sur ce chemin difficile. Pendant des mois, sa fille, inscrite à la crèche, n’y a pas mis les pieds. « Je trouvais toujours une bonne raison, jusqu’au jour où j’ai compris qu’elle avait besoin de nouveaux contacts. » Aujourd’hui, Claire se rend deux heures par semaine à la halte-garderie de la commune. Elle participe également à un atelier de l’IME, une matinée par semaine, et bientôt davantage : « J’ai demandé une journée supplémentaire, étant donné les progrès qu’elle y fait ! » Un cheminement qui reste encore fragile. Karen avoue ne pas arriver à profiter de son temps libre. Les après-midi sans sa fille, cette mère reste près du téléphone, inquiète de recevoir un appel de détresse. L’aide d’un psychologue peut débloquer certains comportements et empêcher que les difficultés s’installent. Dialoguer, expliquer et tenter prudemment l’expérience d’un changement d’habitudes permet toujours d’avancer.
Source : http://www.magazine-declic.com/chemin-a-parcourir-de-confier-enfant/

Vivre le handicap de son enfant, l’aimer au-delà des REGARDS.

Mélanie est la maman d’une petite Chloé, 6 ans, atteinte de troubles de la socialisation. En rencontrant d’autres parents confrontés à la même situation, elle s’est rendue compte que son mari et elle n’étaient pas les seuls à « naviguer sur la houle capricieuse du handicap ». Elle a souhaité donner la parole à d’autres mamans d’enfants handicapés pour montrer que la peur irraisonnée du handicap se dompte et que l’amour de la différence s’apprivoise.

 

Isa, maman de Laurène, 10 ans, souffrant d’autisme, Isabelle et sa souriante Audrey, 5 ans, touchée par des myoclonies de type épileptique, Stéphanie, maman d’un grand angoissé puis Christine et sa chaleureuse petite dysphasique. Toutes ces mamans ont tombé le masque de la culpabilité, de la frustration, de l’incompréhension pour laisser place, avec le recul, à l’espoir et l’optimisme.

Au tout début, la solitude comme refuge

Les troubles chez le nourrisson se détectent difficilement. Quelquefois, les parents s’inquiètent face à l’évolution atypique de leur bébé : pas de gazouillis, suivi du regard épars, aucune réaction aux stimulations, caractère introverti ou absence de langage. Mais, l’intuition maternelle n’est pas une preuve médicale suffisante : « trop tôt pour conclure à une déficience », assurait-on toujours à Christine. Mais, quand il n’y a pas de place au doute, les examens et les investigations s’imposent. Beaucoup de parents se disent choqués par « la raideur des propos dans la formulation du diagnostic ». Ce manque de souplesse ne les a pas aidés à surmonter la gravité du moment. Quand la maladie devient réalité, les parents se trouvent démunis et peuvent sombrer dans une profonde déprime, voire une dépression, avec la culpabilité et la solitude comme refuge. Le couple, face à de pareilles épreuves, se doit d’être soudé. L’aide supplémentaire des amis et de la famille rassure. Une épaule consolatrice, une oreille attentive, adoucit le chagrin des parents ; cette présence peut leur permettre de se retrouver en tête-à-tête, et d’oublier un peu les grimaces de la vie. Parfois, les parents ressentent fortement de« l’incompréhension et de la tristesse » face à l’indifférence de leurs proches. Isa raconte que « des amis sont partis d’eux-mêmes. Ils n’étaient sûrement pas prêts à accepter Laurène. »

Le regard des autres, un obstacle à franchir

En société, le sentiment premier des parents d’enfants handicapés consiste en un malaise ou une dévalorisation, voire une honte inconsciente vis-à-vis de leur descendance. Bien des fois, les parents se montrent discrets de peur d’être démasqués « par les regards inquisiteurs, ou les moqueries. » Isa s’est trouvée en proie à la méchanceté gratuite de ses semblables lors d’un dîner au restaurant : « Ramenez votre fille à la maison », s’est-elle entendue dire. En général, les parents n’attachent pas d’importance à ces remarques désobligeantes ; ils n’interviennent que lorsque le verbe devient irrespectueux. C’était le cas. Cette animosité ne traduit-elle pas une incompréhension ? Ou n’est-elle que le reflet d’une crainte refoulée envers la personne handicapée ?

Pour les personnes extérieures à la famille, l’approche requiert patience et adaptation. Les parents conçoivent qu’intégrer l’enfant comme il vient n’est ni aisé, ni inné. Mais ils réclament moins de sentences hâtives, plus d’indulgence et de respect. Isa soulève que « c’est plutôt nous, les parents, qui évoluons face aux regards des autres, et non l’inverse. » Isabelle, Stéphanie et Christine lancent ces mots comme un refrain : « la maladie de nos enfants fait peur, parce qu’ils ne rentrent pas dans les normes. » Pour passer au-dessus ces jugements, rien de mieux que de se répéter comme un mantra : « Je me fiche de ce que les autres pensent de mon enfant. Je l’aime assez pour me détacher des regards arbitraires. »

Les enfants, plus ouverts à la différence

Vincent, 7 ans, communique avec sa petite sœur Audrey grâce au langage des signes ; Théo, du même âge, encourage sa soeur et, pour elle, s’invente professeur. Au sein même des membres de la famille, apparaissent une complicité et une patience qui semblent innées, sans contrainte, ni pression des parents. Cette solidarité se trouve souvent renforcée par les Maîtresses et les Aides Maternelle : un copain en mauvaise posture fait naître affection et entraide autour de lui. En ce sens, les enfants nous montrent le chemin de la véritable solidarité. Chloé est enchantée que ses camarades s’intéressent à elle. L’angoisse d’aller vers les autres s’amenuise et la communication se fait plus fluide. Le sourire communicatif d’Audrey remporte tous les suffrages d’amitié ; tous ses copains ont soufflé les bougies de son cinquième anniversaire. « Cela m’a fait chaud au cœur », avoue sa maman.

Un investissement sans limites/ Tous unis pour les progrès de

Aujourd’hui, maints organismes soutiennent les parents dans leur combat tandis que des mesures concrètes sont mises en place : des groupes d’éveil, des cours d’orthophonie avec le programme Makaton (une méthode d’apprentissage pour les enfants atteints de troubles du langage), des nouvelles méthodes comme celle ABA(développement de l’autonomie chez la personne autiste), des ateliers centré sur la psychomotricité, des suivis réguliers en pédopsychiatrie, en neuro-pédiatrie ou en orthoptie, sans parler de la recherche médicale, et des différentes prestations proposées aux familles comme les services à domicile. De son côté, l’Ecole progresse énormément dans l’intégration de ces enfants ; elle collabore de plus en plus avec les spécialistes de l’enfance, la Maison du Handicap et les parents. Chloé et Audrey bénéficient, par exemple, quelques matinées par semaine, d’une aide spécialisée proposée par les Auxiliaires de Vie Scolaire (A.V.S).

Enfin, c’est bien sûr l’investissement des parents qui permet à leur petit de s’ouvrir peu à peu au monde, car chaque enfant, quel qu’il soit, a un avenir. Nous devons croire en eux, en leur capacité et leur faire confiance : vœux de réussite scolaire ou désir de simple autonomie, chacun s’ancre dans des projets à plus ou moins long terme.

La plus dure des épreuves pour les parents d’enfants peu ordinaires ? Accepter la différence de son petit au quotidien. Pourtant les sentiments de peine, de déception et de doute laissent peu à peu place à la tolérance et à l’envie de partage. Une véritable leçon de vie… pour les autres. Approchez-vous plus près de nos enfants, donnez leur la main, riez, dansez et vivez ensemble !

Propos recueillis par Mélanie Gouaillardou
Paroles de maman.com

Les regards enfants parents professionnels

Quelle a été votre réaction lorsque vous avez appris que vous alliez accueillir un enfant porteur de handicap ?

L.(cap petite enfance): J’ai ressenti de l’appréhension notamment par rapport au type de handicap (moteur, psychique,…) et sur la question de comment répondre au mieux aux besoins et attentes de l’enfant et sa famille. Je n’ai pas eu de formation sur le handicap donc j’ai eu quelques inquiétudes. Je me suis aussi demandée la place de cet enfant au sein de la structure, quels sont les bienfaits? Quelles attitudes vont avoir les autres enfants vis-à-vis de lui. J’ai donc posé beaucoup de questions à l’auxiliaire référente sur l’accueil des enfants porteur de handicap.

C.(puéricultrice): Je me suis d’abord renseigné sur le type de handicap. Mon principal questionnement était de pouvoir accueillir M. en toute sécurité mais aussi celle des autres enfants.

N.(auxiliaire de puériculture): Il y a toujours un peu d’appréhension, à savoir quel type de handicap et comment le gérer au niveau du groupe.

Qu’avez-vous observé dans le comportement des autres enfants ?

L.: Certains enfants prenaient le temps d’observer M. mais après ils se sont montrés curieux et ont rapidement été vers elle. Cet enfant était même attendue, je repense à un petit garçon qui lui apportait une balle à malaxer à son arrivée parce qu’il avait remarqué que M. jouait beaucoup avec. Beaucoup d’enfants lui apportaient des jouets tout autour parce qu’une fois au sol cet enfant ne pouvait pas se relever seule.

C.: J’ai pu observer des gestes de tendresse comme des câlins, des bisous, des caresses.

E.:(auxiliaire de puériculture): Certains enfants m’ont demandé pourquoi M. ne parlait pas mais avaient compris par ses sons ce dont elle avait besoin. Certains ont mis quelques temps avant de l’approcher sans en avoir peur, je me souviens d’un petit garçon qui a passé un long moment à imiter ses postures. Il y a aussi eu un jour où un petit garçon a poussé M. qui était debout mais pour jouer avec elle, qui était tout malheureux de son geste parce qu’il ne pensait pas la faire tomber. Il n’a plus jamais recommencé.

– Quelles ont été les réactions des autres parents ?

L.: J’ai vu que certains parents observaient M. mais ils ne sont jamais venus me poser de questions.

E.: Un jour, alors que je sortais de la salle de change avec M. j’ai croisé dans le couloir une maman avec sa petite fille. La petite fille a dit bonjour à M. J’ai dit bonjour à cette maman et sa fille mais la maman ne m’a pas entendu, elle regardait M. : Je lui ai alors dit « oui, voici M. que nous accueillons les mercredis matin », la maman m’a alors regardé en souriant et en me disant « ah oui c’est très bien ». Ensuite elle s’est adressée directement à M. en lui disant qu’elle marchait bien et qu’elle était jolie.

– Est-ce que cet accueil a changé votre regard sur le handicap ?

L.: Oui, j’ai pris conscience de l’importance du travail d’équipe pluridisciplinaire pour accompagner au mieux les enfants porteur de handicap. J’ai aussi vu les bienfaits de cet accueil sur l’enfant, elle souriait beaucoup et ne voulait jamais quitter la structure. J’ai observé que les autres enfants étaient très attentionnés envers elle.

E.: Cet accueil m’a permis de me rendre compte que les enfants n’ont pas d’appréhension sur le handicap contrairement à nous les adultes. Ils comprennent vite la différence et ça ne les dérange pas, ils ont développés leur esprit d’entraide. J’ai toujours vu cet enfant comme une enfant justement.

– Quelles étaient vos craintes au départ ?

L.: J’avais peur de ne pas savoir la comprendre comme elle ne parle pas, peur qu’elle fasse une crise et comment gérer le reste du groupe.

C.: Cette communication différente a été source d’inquiétude.

 

Interview de deux auxiliaires de puériculture, d’une puéricultrice et d’une personne titulaire du cap petite enfance sur le regard du handicap au sein d’un multi accueil municipal, suite à la prise en charge d’une enfant épileptique M. avec retard moteur et du développement du langage.

Thématique – Handicap nécessitant une technicité

« Rendre possible l’accueil d’un enfant ayant un handicap (lourd) nécessitant une technicité »

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« Être parmi d’autres ». Accueil d’un enfant porteur de handicap à la crèche
Roux-Levrat Jocelyne, Spirale 2/2006 (no 38) , p. 127-140 Éditeur : ERES

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Accueil des enfants IMC en creche – Extrait des maternelles FRANCE 5 : VIDEO

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Laisser son enfant malade ou handicapé à un proche pour le week-end, ou pour quelques heures dans une halte-garderie : c’est possible !

Certains enfants, alimentés très tôt et longtemps par sonde naso-gastrique ou gastrostomie, n’arrivent plus à s’en passer et à manger par la bouche. Revue des solutions pour passer le cap.

Thématique – Le regard des autres (enfants, parents, professionnels)

« Vivre avec un enfant en situation de handicap sous le regard des autres, que l’on soit parent ou professionnel : le regard des autres (enfants, parents, professionnels…) sur l’accueil de l’enfant en situation de handicap… »

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WILLIS Jeanne – Alice sourit

YOUNG Ed – 7souris dans le noir

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Les regards enfants parents professionnels

Paroles de parents

 

« Petite enfance et handicap : partenariats nécessaires ! »

Pour entamer cette synthèse, je reprendrai la métaphore sur le partenariat citée par un intervenant, métaphore qui illustre la différence entre suppléance et substitution : « La vache supplée à la fonction lactifère de la mère, mais elle n’est en rien la mère. » Si j’ai bien compris, en tant que professionnels, nous jouons le rôle de la vache. Et celle-ci ne doit pas se prendre pour la mère…

De cette journée de réflexion sur le partenariat des structures d’accueil de l’enfance avec le secteur spécialisé, je retiens cinq axes.

1) L’intégration, l’accueil en milieu « ordinaire » (structures multi-accueil, de loisirs, école, etc.), implique le partenariat avec le secteur spécialisé.
2) Le partenariat se construit « en passant par » les parents.
3) il faut maîtriser le sens de nos représentations du fonctionnement humain pour construire une pensée partagée sur la situation de l’enfant.
4) La globalité n’appartient pas aux professionnels ; ceux-ci doivent assurer une cohérence d’action, sans prétendre maîtriser l’itinéraire de l’enfant.
5) Les freins et les facilitateurs de partenariat.
1) L’intégration, l’accueil en milieu « ordinaire » (structures multi-accueil, de loisirs, école, etc.), implique le partenariat avec le secteur spécialisé.

En l’absence de partenariat avec le secteur spécialisé, on demande à l’enfant de s’adapter à la norme ordinaire sans lui offrir les soutiens compensatoires relatifs à son handicap.
Par ailleurs, il n’y a pas de recette, de savoir-faire idéal, pour réussir l’accueil d’un enfant avec un handicap. Il y a toujours des adaptations à inventer. C’est le rôle des structures telles que les CAMSP (Centre d’action médico-social précoce) et les SESSAD (Service d’éducation spécialisée et de soin à domicile) : proposer des aménagements matériels, des dispositions qui permettent notamment d’accueillir l’enfant avec ses pairs d’âge au lieu de le maintenir avec des enfants beaucoup plus jeunes parce qu’il n’a pas acquis les compétences relatives à son âge.
Chaque situation est singulière, ce qui signifie qu’il faut mettre en place des dispositifs souples :
– non seulement adaptés à chaque enfant,
– mais aussi qui permettent aux parents et à l’enfant de cheminer au fil du temps au sein de la structure d’accueil.
2) Le partenariat se construit « en passant par » les parents.

Le partenariat s’établit tout d’abord avec les parents (qui ne sont pas partenaires mais parents, autrement dit responsables de l’éducation de l’enfant), afin d’élaborer un projet avec eux.

Quel est le rôle du parent avec les professionnels partenaires autour de l’enfant ?
– Choisir les dispositifs qui vont intervenir auprès de l’enfant, autrement dit être informé de son évolution, des contours de son handicap, et des propositions à son intention,
– être le pivot, le point de passage des différents professionnels et l’enfant.
Certes, des désaccords peuvent surgir entre professionnels et parents, par exemple sur une méthode considérée comme bénéfique par les parents et inappropriée par les professionnels.
Dans ce cas, il est nécessaire que l’équipe dise quelle est son approche et indique aux parents qu’ils peuvent faire d’autres choix.
Il faut rechercher des compromis, des consensus partiels, faire éventuellement des chemins parallèles, énoncer les désaccords et les convergences à partir desquelles on peut travailler.

Quelles sont les difficultés que les parents peuvent rencontrer avec un réseau d’intervenants ? A quoi les professionnels doivent-ils être vigilants ?
Des parents nous ont fait part aujourd’hui de leurs difficultés à choisir lorsqu’ils se trouvent devant des partenaires qui leur présentaient des options thérapeutiques, éducatives, rééducatives, différentes.
Ces témoignages doivent nous interpeller, en tant que professionnels, sur la façon dont nous réclamons de telle ou telle référence comme étant la bonne de façon exclusive. Nous devons éviter de penser en noir ou blanc, être capable de tenir des idées distinctes en tension, de les articuler en situation pour offrir des solutions pragmatiques, non pas idéales mais les plus appropriées à la situation de cet enfant-là aujourd’hui avec ces parents-là.
Certains ont évoqué l’écart entre les déclarations idéales de la loi du 11 février 2005, qui risque de faire croire aux parents qu’ils ont le choix entre différentes approches thérapeutiques, éducatives, rééducatives, alors que concrètement ils ont peu de latitude.
Les parents sont mis aujourd’hui en responsabilité d’individualiser le parcours de leur enfant, d’en assumer les choix avec les conséquences que cela impliquera ? S’agit de choix éclairés s’ils ne rencontrent pas des professionnels qui s’efforcent eux-mêmes à la pondération dans les orientations théoriques, à une prudence pragmatique en situation ?
Sans doute, les questions que se posent les parents en termes de choix pour leur enfant avec un handicap sont les mêmes que celles de tout parent pour tout enfant. Mais, quand l’enfant est en situation de handicap, ces questions sont exacerbées car les enjeux sont sans commune mesure, les erreurs peuvent être dramatiquement conséquentes.
Si donc le partenariat nous amène à renouveler sans cesse nos questionnements, il ne faut pas oublier que nous avons aussi la responsabilité d’offrir une cohérence aux parents, et de les aider dans un choix éclairé.
Enfin, je retiens ce propos d’un parent : « Quand on vient voir les professionnels et qu’on évoque des méthodes avec eux, ce n’est pas pour leur apporter une solution, mais pour leur dire quelle est notre réflexion et que nous souhaitons qu’elle soit entendue comme intéressante. »
Cette capacité à entendre la validité du point de vue du parent bien qu’il ne soit pas un spécialiste de la question… C’est tout sauf facile, car cela implique d’écarter temporairement nos références habituelles et de penser à partir des références qui soutiennent le propos de notre interlocuteur.

3) Il faut maîtriser le sens de nos représentations du fonctionnement humain pour construire une pensée partagée sur la situation de l’enfant.

Chaque corps professionnel construit une représentation de l’humain, qui lui permet de situer dans quel domaine il agit auprès de l’enfant, sans ignorer l’existence des autres domaines (Par exemple cette représentation des différents axes du fonctionnement humain qui nous a été proposée par l’un des intervenants : les praxies, les gnosies, la perception de soi, la relation aux autres).
Il importe que chacun travaille sur les mots qu’il emploie, qu’il en maîtrise précisément le sens, afin de présenter son point de vue, de rendre sa représentation du fonctionnement humain vrai-semblable pour le partenaire qui appartient à un autre corps professionnel. Vraisemblable au sens de semblable à ce qui est suffisamment vrai pour l’autre, c’est-à-dire suffisamment proche de son système de pensée pour qu’il puisse l’apparier à sa propre approche de la situation de l’enfant.
Le partenariat implique une pensée partagée sur l’enfant, autrement dit un espace de convergence favorable à l’échange et nécessaire à la cohérence d’action. « Ni rire, ni juger, mais comprendre l’autre. » nous dit Spinoza.
Cela signifie notamment que chaque équipe, a besoin de savoir où elle se situe dans le réseau partenarial et quelle est l’architecture du réseau auquel elle contribue. Qui fait quoi ? Qui est responsable de quoi ? Qui peut-on interpeller ?
Pour reprendre la métaphore développée aujourd’hui par l’un des intervenants, il est nécessaire que chaque acteur ne regarde pas le ciel étoilé comme une nébuleuse sans repère, mais qu’il y retrouve des configurations stellaires familières. Le réseau doit être dans l’esprit de ses acteurs une structure repérable, constituée par différents éléments, dont la cohérence se dessine à partir des liens établis entre des éléments distincts.
4) La globalité n’appartient pas aux professionnels ; ceux-ci doivent assurer une cohérence d’action, sans prétendre maîtriser l’itinéraire de l’enfant.

La prétention professionnelle à la globalité (répondre à tous les besoins de l’enfant), c’est la fermeture de l’institution sur sa vérité, la prétention de la totalité. Or, le partenariat est précisément le contraire, puisque c’est l’identification de la complémentarité.
Dans la situation de ce matin, était notamment soulignée la distinction des lieux, la répartition de rôles entre le CAMSP- lieu de soin (on y parle du handicap) – et la crèche, la Halte-Garderie, ou la maternelle, – lieu de vie (on considère l’enfant comme les autres, sans mettre son handicap en exergue). En structure d’accueil ordinaire, il ne s’agit pas de rééduquer mais d’offrir un lieu de vie avec les autres : « Etre à côté de l’enfant sans intention particulière, pour qu’il prenne des initiatives, être juste un pas derrière lui. », comme le disait une intervenante.
Au CAMSP et dans le lieu d’accueil en milieu ordinaire, l’enfant connaît des situations distinctes, avec ses parents il en connaît d’autres, avec ses grands parents d’autres aussi, avec ses frères et soeurs d’autres encore, etc.
Non seulement aucun des acteurs professionnels qu’il rencontre ne peut prétendre avoir une représentation globale de sa situation, mais surtout chacun d’entre eux ne doit se penser que comme l’un des accompagnateurs temporaires et sectoriels sur un itinéraire de vie dont la globalité appartient à l’enfant et ses parents, ces derniers étant d’abord responsables de son projet de vie pour qu’il en devienne progressivement le détenteur.
Par contre il importe que l’action de chaque partenaire s’inscrive dans une cohérence d’ensemble pour que la complémentarité soit pertinente : le partenariat ne doit pas être une mosaïque éclatée d’interventions mais une dynamique d’action partagée.
Cette dynamique doit respecter le rythme de l’enfant et le cheminement des parents, c’est-à-dire partir de ce qu’ils sont et non de ce que l’on voudrait qu’ils soient, de là où ils en sont et non de là où l’on voudrait qu’ils en soient.
Il s’agit notamment pour les professionnels de ne pas mettre en acte des pensées inappropriées à ce que sont les parents et l’enfant. Le professionnalisme consiste à écarter – au moins temporairement – de sa réflexion les objectifs qui ne sont pas adaptés au contexte familial du moment, à savoir renoncer provisoirement. L’équipe doit être garante de ce renoncement pour que ses membres ne projettent pas leurs désirs d’action et de réussite inappropriées au contexte familial.
5) Les freins et les facilitateurs du partenariat.

Disjoindre les interventions est nécessaire, car on ne sait pas tout faire. Il faut donc rechercher les complémentarités. Cependant, la multiplication des articulations pose des problèmes. De nombreux professionnels sont concernés par les concertations sur le projet de l’enfant, les déperditions d’information nuisent à la cohérence.
Par ailleurs, la présence d’un trop grand nombre de professionnels dans les rencontres avec les parents peut entraver la qualité des échanges avec ceux-ci et leur participation au projet éducatif ou thérapeutique.
Certains tuilages internes au sein des services sont donc nécessaires, un seul professionnel représentant ses collègues pour permettre une présence plus réduite en nombre aux rencontres avec les parents.
Il convient en outre de rappeler le caractère impérieux de la consultation des parents avant, par exemple, les réunions d’équipe éducative dans le cadre de la scolarisation.

Divers freins au travail en partenariat ont été identifiés au cours de la journée :
– des représentations exclusives sur le devenir de l’enfant, un jargon technique inaccessible ;
– de fausses évidences entre professionnels autour de mots-valises, oublieuses des explications nécessaires, qui entretiennent l’illusion qu’on s’est mis d’accord sans préciser les objectifs respectifs ;
–  l’éloignement géographique des partenaires, dispendieux en temps, qui réduit les échanges ;
– les partenariats établis sur le mode d’une nécessité urgente – « Nous avons un problème, ils ont une solution. » – qui empêche de réfléchir sur le sens de l’action entreprise.
Enfin des facilitateurs de partenariat ont aussi été répertoriés :
– une conception en termes de micro-concertations concrètes plutôt qu’en objectifs trop généraux ;
– l’existence d’un référent dans chaque service, pour chaque situation, assurant la coordination du projet avec les autres services ;
– la détermination de l’utilité prévalente de chaque partenaire, des priorités qu’il doit poursuivre pour éviter les recouvrements inutiles ;
–  le tissage de relations pour construire le « 1er rang du tricot » : les professionnels spécialisés se déplacent, interviennent parfois dans les lieux de vie de l’enfant ; on se voit, on se parle, on laisse une place à l’imprévu de ce qu’on va échanger, on découvre l’intérêt d’observer les progrès de l’enfant dans un lieu autre que celui du soin.
– une conception du partenariat non comme un plus mais comme une nécessité ; le souci des services spécialisés de se demander quelles sont les personnes en contact avec l’enfant, dans quels milieux il vit, pour que le lien partenarial devienne une habitude.

Forum Enfance Accueil organisé par l’association « Une Souris Verte »
18 octobre 2007
« Petite enfance et handicap : partenariats nécessaires »
Synthèse des travaux (Bertrand Dubreuil)

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