Vivre le handicap de son enfant, l’aimer au-delà des REGARDS.

Mélanie est la maman d’une petite Chloé, 6 ans, atteinte de troubles de la socialisation. En rencontrant d’autres parents confrontés à la même situation, elle s’est rendue compte que son mari et elle n’étaient pas les seuls à « naviguer sur la houle capricieuse du handicap ». Elle a souhaité donner la parole à d’autres mamans d’enfants handicapés pour montrer que la peur irraisonnée du handicap se dompte et que l’amour de la différence s’apprivoise.

 

Isa, maman de Laurène, 10 ans, souffrant d’autisme, Isabelle et sa souriante Audrey, 5 ans, touchée par des myoclonies de type épileptique, Stéphanie, maman d’un grand angoissé puis Christine et sa chaleureuse petite dysphasique. Toutes ces mamans ont tombé le masque de la culpabilité, de la frustration, de l’incompréhension pour laisser place, avec le recul, à l’espoir et l’optimisme.

Au tout début, la solitude comme refuge

Les troubles chez le nourrisson se détectent difficilement. Quelquefois, les parents s’inquiètent face à l’évolution atypique de leur bébé : pas de gazouillis, suivi du regard épars, aucune réaction aux stimulations, caractère introverti ou absence de langage. Mais, l’intuition maternelle n’est pas une preuve médicale suffisante : « trop tôt pour conclure à une déficience », assurait-on toujours à Christine. Mais, quand il n’y a pas de place au doute, les examens et les investigations s’imposent. Beaucoup de parents se disent choqués par « la raideur des propos dans la formulation du diagnostic ». Ce manque de souplesse ne les a pas aidés à surmonter la gravité du moment. Quand la maladie devient réalité, les parents se trouvent démunis et peuvent sombrer dans une profonde déprime, voire une dépression, avec la culpabilité et la solitude comme refuge. Le couple, face à de pareilles épreuves, se doit d’être soudé. L’aide supplémentaire des amis et de la famille rassure. Une épaule consolatrice, une oreille attentive, adoucit le chagrin des parents ; cette présence peut leur permettre de se retrouver en tête-à-tête, et d’oublier un peu les grimaces de la vie. Parfois, les parents ressentent fortement de« l’incompréhension et de la tristesse » face à l’indifférence de leurs proches. Isa raconte que « des amis sont partis d’eux-mêmes. Ils n’étaient sûrement pas prêts à accepter Laurène. »

Le regard des autres, un obstacle à franchir

En société, le sentiment premier des parents d’enfants handicapés consiste en un malaise ou une dévalorisation, voire une honte inconsciente vis-à-vis de leur descendance. Bien des fois, les parents se montrent discrets de peur d’être démasqués « par les regards inquisiteurs, ou les moqueries. » Isa s’est trouvée en proie à la méchanceté gratuite de ses semblables lors d’un dîner au restaurant : « Ramenez votre fille à la maison », s’est-elle entendue dire. En général, les parents n’attachent pas d’importance à ces remarques désobligeantes ; ils n’interviennent que lorsque le verbe devient irrespectueux. C’était le cas. Cette animosité ne traduit-elle pas une incompréhension ? Ou n’est-elle que le reflet d’une crainte refoulée envers la personne handicapée ?

Pour les personnes extérieures à la famille, l’approche requiert patience et adaptation. Les parents conçoivent qu’intégrer l’enfant comme il vient n’est ni aisé, ni inné. Mais ils réclament moins de sentences hâtives, plus d’indulgence et de respect. Isa soulève que « c’est plutôt nous, les parents, qui évoluons face aux regards des autres, et non l’inverse. » Isabelle, Stéphanie et Christine lancent ces mots comme un refrain : « la maladie de nos enfants fait peur, parce qu’ils ne rentrent pas dans les normes. » Pour passer au-dessus ces jugements, rien de mieux que de se répéter comme un mantra : « Je me fiche de ce que les autres pensent de mon enfant. Je l’aime assez pour me détacher des regards arbitraires. »

Les enfants, plus ouverts à la différence

Vincent, 7 ans, communique avec sa petite sœur Audrey grâce au langage des signes ; Théo, du même âge, encourage sa soeur et, pour elle, s’invente professeur. Au sein même des membres de la famille, apparaissent une complicité et une patience qui semblent innées, sans contrainte, ni pression des parents. Cette solidarité se trouve souvent renforcée par les Maîtresses et les Aides Maternelle : un copain en mauvaise posture fait naître affection et entraide autour de lui. En ce sens, les enfants nous montrent le chemin de la véritable solidarité. Chloé est enchantée que ses camarades s’intéressent à elle. L’angoisse d’aller vers les autres s’amenuise et la communication se fait plus fluide. Le sourire communicatif d’Audrey remporte tous les suffrages d’amitié ; tous ses copains ont soufflé les bougies de son cinquième anniversaire. « Cela m’a fait chaud au cœur », avoue sa maman.

Un investissement sans limites/ Tous unis pour les progrès de

Aujourd’hui, maints organismes soutiennent les parents dans leur combat tandis que des mesures concrètes sont mises en place : des groupes d’éveil, des cours d’orthophonie avec le programme Makaton (une méthode d’apprentissage pour les enfants atteints de troubles du langage), des nouvelles méthodes comme celle ABA(développement de l’autonomie chez la personne autiste), des ateliers centré sur la psychomotricité, des suivis réguliers en pédopsychiatrie, en neuro-pédiatrie ou en orthoptie, sans parler de la recherche médicale, et des différentes prestations proposées aux familles comme les services à domicile. De son côté, l’Ecole progresse énormément dans l’intégration de ces enfants ; elle collabore de plus en plus avec les spécialistes de l’enfance, la Maison du Handicap et les parents. Chloé et Audrey bénéficient, par exemple, quelques matinées par semaine, d’une aide spécialisée proposée par les Auxiliaires de Vie Scolaire (A.V.S).

Enfin, c’est bien sûr l’investissement des parents qui permet à leur petit de s’ouvrir peu à peu au monde, car chaque enfant, quel qu’il soit, a un avenir. Nous devons croire en eux, en leur capacité et leur faire confiance : vœux de réussite scolaire ou désir de simple autonomie, chacun s’ancre dans des projets à plus ou moins long terme.

La plus dure des épreuves pour les parents d’enfants peu ordinaires ? Accepter la différence de son petit au quotidien. Pourtant les sentiments de peine, de déception et de doute laissent peu à peu place à la tolérance et à l’envie de partage. Une véritable leçon de vie… pour les autres. Approchez-vous plus près de nos enfants, donnez leur la main, riez, dansez et vivez ensemble !

Propos recueillis par Mélanie Gouaillardou
Paroles de maman.com