Le handicap fait la une, depuis peu, et cela peut paraître surprenant, parce que même si le mot n’est pas tabou, le handicap n’est pas quelque chose dont nous avons spontanément envie d’entendre parler ou que nous aimons voir. Sans être un monstre d’intolérance, chacun d’entre nous doit admettre que le face-à-face avec le handicap le met généralement mal à l’aise.
Les raisons de notre malaise
Plusieurs raisons à cela. La psychanalyse répondrait que cela renvoie à une peur primaire et inconsciente de la contagion : via le seul regard, la crainte d’être touché à son tour, d’être atteint. Pourquoi ? Parce que nous sommes hantés par un sentiment plus ou moins fort et inconscient de culpabilité : pourquoi lui et pas moi ? Est-ce que je ne le « mérite » pas, moi aussi ? Est-ce que cela ne va pas m’arriver, moi qui aie eu telle attitude, telle pensée, telle parole… ? C’est comme si, au fond de nous, et de façon tout à fait irrationnelle, le handicap tenait lieu de châtiment.
Par ailleurs, le handicap interroge et bouscule ce que nous appelons la normalité. Il ne rentre pas dans son moule, il ne suit pas ses règles et cela nous insécurise. Surtout dans une société où la norme sociale pèse si lourdement.
Enfin, et toujours dans ce jeu de miroir et d’identification, le handicap nous confronte à ce que nous refoulons pour bien vivre au quotidien : la conscience des limites du vivant, du risque de l’amoindrissement, du « déficit ». Il nous renvoie à la fragilité en général et à toutes nos fragilités en particulier. Tout ce qui fait que, au fond, nous sommes tous handicapés chacun à sa façon, parce que nous avons tous des failles, des traumatismes, des faiblesses.
Vers une meilleure acceptation
Mais ce succès signifie-t-il pour autant que l’on aurait moins peur, aujourd’hui, de tout ce que représente le handicap ? Tout d’abord, multiplier les débats, les actions qui rendent visible le handicap participe, de toute évidence, de la banalisation, donc de l’acceptation du handicap. Ou plus généralement de la différence.
La personne handicapée c’est l’autre, avec un grand A, le différent de moi. Donc plus nous sommes amenés à voir, à vivre parmi des personnes « différentes », plus nous acceptons ces différences, moins elles nous inquiètent. C’est aussi simple que cela. Même si cela est loin d’être acquis, parce que c’est un long processus et qui rencontrera toujours des résistances intérieures, inconscientes, mais avec plus de souplesse et de douceur.
Face à nos propres fragilités
Par ailleurs, si le handicap renvoie chacun de nous aux limites du vivant et à nos fragilités, cela signifie également que nous sommes davantage prêts à les accepter aujourd’hui.
Retrouver du lien
Il est peut-être d’autant plus facile aujourd’hui de s’identifier à des personnes handicapées qu’on ne s’est sans doute jamais senti tous aussi vulnérables. Nous avons besoin de nous retrouver autour de ces notions de fragilité et de vulnérabilité. Sinon pour faire front, en tout cas pour faire lien.
Extrait Psychologie nov 2011